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Page:About - Germaine.djvu/113

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Le baron est ce qu’on appelle encore aujourd’hui un parfait gentilhomme. Il n’est pas beau, et il a quelque peu la physionomie de son nom. Sa grosse figure colorée se cache dans un buisson de barbe rousse. Il est robuste comme un chasseur, avec une pointe de ventre, et vous ne lui donneriez pas plus de quarante ans, quoiqu’il en ait cinquante. Les barons de Sanglié datent d’une époque où l’on bâtissait solidement. Assez riche pour mener grand train sans rien faire, il se traite en ami, prend soin de sa personne, et vit pour vivre bien. Son costume et sa tournure sont également aristocratiques. On le rencontre le matin dans des vêtements larges, solides, confortables et d’une élégance coquettement négligée. Le soir, il est irréprochable sans avoir l’air habillé. Il est de ces hommes fort rares dont la tenue ne frappe jamais les yeux : on dirait que leurs habits ont poussé sur eux et sont le feuillage naturel de leur personne. Ses redingotes se font à Londres et ses habits à Paris. Il a soin de son corps, cet autre vêtement de l’homme. Il monte à cheval tous les jours et fréquente le jeu de paume ; le soir il est abonné aux deux opéras, et il fait le whist à son club. Beau joueur, bon convive et buveur magnifique ; grand connaisseur en cigares, grand amateur de tableaux, assez bon cavalier pour gagner un steeple-chase, trop sage pour faire courir et jeter sa fortune dans une écurie d’en-