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Page:About - Germaine.djvu/116

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jambes, mais au vice élégant. M. de Sanglié le mena chez un grand tailleur du boulevard, comme on conduit un réfractaire chez le capitaine d’habillement. On le força d’endosser la livrée des gens du monde. Ce singulier malade était toujours idolâtre de sa vieille personne, mais il économisait depuis longtemps sur les frais du culte. Il avait gardé l’habitude de se teindre et de se peindre, et il ne négligeait aucune des pratiques qui pouvaient lui rendre une apparence de jeunesse ; mais il ne détestait pas de paraître plus neuf que son habit. On lui prouva, par quelques mètres de drap fin, qu’un habit neuf rajeunit la tournure, et il confessa de lui-même que les tailleurs n’étaient pas gens à mépriser. C’était un grand pas en avant : un homme habillé est à moitié sauvé. Les pères de famille le savent bien : lorsqu’ils viennent à Paris arracher un enfant prodigue à la mauvaise compagnie, leur premier soin est de le conduire chez un tailleur.

Le baron se chargea de lancer son élève. Il le fit admettre à son club. On y dînait bien, et M. de La Tour d’Embleuse ne perdit pas à changer de cuisine. Avant sa conversion, la nourriture épicée des cabarets et l’usage des boissons frelatées irritaient son estomac, rougissaient sa langue et le condamnaient à une soif inextinguible. Il la trompait en buvant de plus belle, et le pauvre homme était