Page:About - Germaine.djvu/168

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passa chez un petit serrurier de la route d’Essonne qui soufflait sa forge malgré la loi du repos dominical. L’enseigne portait ces mots : Mantoux Peu-de-chance, serrurier en tous genres. Le maître du logis était un petit homme de trente à trente-cinq ans, brun, bien fait, vif et éveillé. On n’avait pas besoin de le regarder deux fois pour deviner à quelle religion il appartenait. Il était de ceux qui font du samedi leur dimanche. L’amour du gain brillait dans ses petits yeux noirs, et son nez ressemblait au bec d’un oiseau de proie. Le Tas le pria de venir à l’hôtel pour forcer une serrure. Il s’acquitta de sa besogne en homme expérimenté. Le Tas le retint auprès d’elle par les charmes de sa conversation. Elle lui demanda s’il était content des affaires ; il répondit en homme dégoûté de la vie. Rien ne lui avait réussi depuis qu’il était au monde. Il avait servi comme groom, et son maître l’avait chassé. Il était entré en apprentissage chez un mécanicien, et la susceptibilité de quelques clients lui avait fait un mauvais parti. À vingt ans, il s’était lancé avec quelques amis dans une affaire magnifique : un travail de serrurerie où tous les associés devaient gagner leur fortune. Malgré son zèle et son habileté, il avait échoué honteusement, et il avait ramé dix ans sans pouvoir se relever de sa chute. Le nom de Peu-de-chance lui était resté depuis ce temps-là. Il était venu s’établir à Corbeil, après un long séjour