Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/126

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place d’un autre ? Des rois ! j’en ai tant vu par terre ! Si l’Empire avait duré dix ans de plus, j’aurais pu me donner un roi pour brosseur ! »

Lorsqu’on lui mit l’atlas sous les yeux, il s’écria d’abord avec un profond dédain : « Ça, la France ! » Mais bientôt deux larmes de tendresse échappées de ses yeux arrosèrent l’Ardèche et la Gironde. Il baisa la carte et dit avec une émotion qui gagna presque tous les assistants :

« Pardonne-moi ma pauvre vieille, d’avoir insulté à ton malheur ! Ces scélérats que nous avions rossés partout, ont profité de mon sommeil pour rogner tes frontières ; mais petite ou grande, riche ou pauvre, tu es ma mère, et je t’aime comme un bon fils ! Voici la Corse, où naquit le géant de notre siècle, voici Toulouse où j’ai reçu le jour ; voilà Nancy, où j’ai senti battre mon cœur, où celle que j’appelais mon Églé m’attend peut-être encore ! France ! tu as un temple dans mon âme ; ce bras t’appartient ; tu me trouveras toujours prêt à verser mon sang jusqu’à la dernière goutte pour te défendre ou te venger ! »