reconnaissance, vous font un devoir de la laisser en paix ! »
Il poussa le colonel à son tour et le fit tomber entre les bras d’un fauteuil.
Fougas rebondit comme si on l’avait jeté sur un million de ressorts. Mais Clémentine l’arrêta d’un geste et d’un sourire.
« Monsieur, lui dit-elle de sa voix la plus caressante, ne vous emportez pas contre lui ; il m’aime.
— Raison de plus, sacrebleu ! »
Il se calma cependant, fit asseoir la jeune fille à ses côtés, et l’examina des pieds à la tête avec toute l’attention imaginable.
« C’est bien elle, dit-il. Ma mémoire, mes yeux, mon cœur, tout en moi la reconnaît et me dit que c’est elle ! Et pourtant le témoignage des hommes, le calcul du temps et des distances, en un mot, l’évidence elle-même semble avoir pris à tâche de me convaincre d’erreur. Se peut-il donc que deux femmes, se ressemblent à tel point ? Suis-je victime d’une illusion des sens ? N’ai-je recouvré la vie que pour perdre l’esprit ? Non ; je me reconnais, je me retrouve moi-même ; mon jugement ferme et droit s’oriente sans trouble et sans hésitation dans ce monde si bouleversé et si nouveau. Il n’est qu’un point où ma raison chancelle : Clémentine ! je crois te revoir et tu n’es pas toi ! Eh ! qu’importe, après tout ? Si le destin qui m’arrache à la tombe a pris