Léon rapportait à son père une robe de chambre trop belle, en étoffe brochée d’or, quelques livres anciens trouvés à Moscou, un joli tableau de Greuze, égaré par le plus grand des hasards dans une ignoble boutique du Gastinitvor, deux magnifiques échantillons de cristal de roche et une canne de M. de Humboldt :
« Tu vois, dit-il à M. Renault en lui mettant dans les mains ce jonc historique, le post-scriptum de ta dernière lettre n’est pas tombé dans l’eau. »
Le vieux professeur reçut ce présent avec une émotion visible.
Je ne m’en servirai jamais, dit-il à son fils : le Napoléon de la science l’a tenue dans sa main. Que penserait-on si un vieux sergent comme moi se permettait de la porter dans ses promenades en forêt ? Et les collections ? Tu n’as rien pu en acheter ? Se sont-elles vendues bien cher ?
— On ne les a pas vendues, répondit Léon. Tout est entré dans le musée national de Berlin. Mais dans mon empressement à te satisfaire, je me suis fait voler d’une étrange façon. Le jour même de mon arrivée, j’ai fait part de ton désir au domestique de place qui m’accompagnait. Il m’a juré qu’un petit brocanteur juif de ses amis, du nom de Ritter, cherchait à vendre une très-belle pièce anatomique, provenant de la succession. J’ai couru chez le juif, examiné la momie, car c’en était une, et payé sans