Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/254

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« Pierre Langevin, dit-il avec emphase, je reviens de l’autre monde et je t’apporte un million. »

Si Gros-Pierre ne voulut point se fâcher, du moins il rougit et la plaisanterie lui sembla de mauvais goût. Mais quand Fougas annonça qu’il avait aimé la grand-maman dans sa jeunesse, le vieux père Langevin n’hésita point à lui lancer une bouteille à la tête. Le fils du colonel, ses magnifiques petits-fils et jusqu’à la mariée se levèrent en grand courroux, et ce fut une belle bataille.

Pour la première fois de sa vie, Fougas ne fut point le plus fort. Il craignait d’éborgner quelqu’un de sa famille. Le sentiment paternel lui ôta les trois quarts de ses moyens.

Mais ayant appris dans la bagarre que Clémentine s’appelait Catherine, et que Pierre Langevin était né en 1810, il reprit l’avantage, pocha trois yeux, cassa un bras, déforma deux nez, enfonça quatre douzaines de dents, et regagna sa voiture avec tous les honneurs de la guerre.

« Diable soit des enfants ! disait-il en courant la poste vers la station d’Avricourt. Si j’ai un fils, qu’il me trouve ! »