Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/271

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le sermonna deux grandes heures. Elle lui dit qu’aux yeux de la société, comme aux yeux de la loi, Clémentine était la petite-fille de M. Langevin ; que d’ailleurs M. Langevin s’était conduit très-honorablement lorsqu’il avait légitimé par le mariage une fille qui n’était pas la sienne ; enfin que la publication d’un tel secret de famille serait comme un scandale d’outre-tombe et flétrirait la mémoire de la pauvre Clémentine Pichon. Le colonel répondait avec la chaleur d’un jeune homme et l’obstination d’un vieillard :

« La nature a ses droits ; ils sont antérieurs aux conventions de la société, et mille fois plus augustes. L’honneur de celle que j’appelais mon Églé m’est plus cher que tous les trésors du monde et je fendrais l’âme en quatre au téméraire qui prétendrait la flétrir. En cédant à l’ardeur de mes vœux, elle s’est conformée aux mœurs d’une grande époque où la brièveté de la vie et la permanence de la guerre simplifiaient toutes les formalités. Enfin, je ne veux pas que mes arrière-petits-fils, qui vont naître, ignorent que la source de leur sang est dans les veines de Fougas. Votre Langevin est un intrus qui s’est glissé frauduleusement dans ma famille. Un intendant, c’est presque un rizpainsel ! Je foule aux pieds la cendre de Langevin ! »

L’obstiné ne céda point aux raisons de Mme Renault, mais il se laissa vaincre aux prières de Clé-