Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/62

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moigna le désir de vivre avec elle et de mettre tout en commun. L’arrivée de cette haridelle aux dents longues effraya singulièrement la petite Clémentine, qui se cachait sous tous les meubles ou se cramponnait aux jupons de sa mère ; mais ce fut le salut de la maison. Mlle Sambucco n’était pas des plus spirituelles ni des plus fondantes, mais c’était l’ordre incarné. Elle réduisit les dépenses, toucha elle-même les revenus, vendit les deux fermes en 1847, acheta du trois pour cent en 1848, et établit un équilibre stable dans le budget. Grâce aux talents et à l’activité de cet intendant femelle, la douce et imprévoyante veuve n’eut plus qu’à choyer son enfant. Clémentine apprit à honorer les vertus de sa tante, mais elle adora sa mère. Lorsqu’elle eut le malheur de la perdre, elle se vit seule au monde, appuyée sur Mlle Sambucco, comme une jeune plante sur un tuteur de bois sec. Ce fut alors que son amitié pour Léon se colora d’une vague lueur d’amour ; le fils de M. Renault profita du besoin d’expansion qui remplissait cette jeune âme.

Durant les trois longues années que Léon passa loin d’elle, Clémentine sentit à peine qu’elle était seule. Elle aimait, elle se savait aimée, elle avait foi dans l’avenir ; elle vivait de tendresse intérieure et de discrète espérance, et ce cœur noble et délicat ne demandait rien de plus.

Mais ce qui étonna bien son fiancé, sa tante et