Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/64

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ne lui firent jamais oublier sa visite quotidienne à la boîte de noyer, ni la génuflexion respectueuse auprès du mort, ni le baiser fraternel ou filial qu’elle déposait régulièrement sur son front. La famille Renault finit par s’inquiéter de symptômes si bizarres ; elle hâta l’enterrement du bel inconnu, pour s’en débarrasser au plus tôt. Mais la veille du jour fixé pour la cérémonie, Clémentine changea d’avis. « De quel droit allait-on emprisonner dans la tombe un homme qui n’était peut-être pas mort ? Les théories du savant docteur Meiser n’étaient pas de celles qu’on peut rejeter sans examen. La chose valait au moins quelques jours de réflexion. N’était-il pas possible de soumettre le corps du colonel à quelques expériences ? Le professeur Hirtz, de Berlin, avait promis d’envoyer à Léon des documents précieux sur la vie et la mort de ce malheureux officier ; on ne pouvait rien entreprendre avant de les avoir reçus ; on devait écrire à Berlin pour hâter l’envoi de ces pièces. » Léon soupira, mais il obéit docilement à ce nouveau caprice. Il écrivit à M. Hirtz.

Clémentine trouva un allié dans cette seconde campagne : c’était M. le docteur Martout. Médecin assez médiocre dans la pratique et beaucoup trop dédaigneux de la clientèle, M. Martout ne manquait pas d’instruction. Il étudiait depuis longtemps cinq ou six grandes questions de physiologie, comme les