Page:About - La Question romaine.djvu/126

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il serait le plus heureux des montagnards. Ses goûts sont simples : une robe de soie rouge, un pouvoir illimité, une fortune énorme, une réputation européenne et tous les plaisirs à l’usage de l’homme ; ce peu lui suffit. Ajoutez une admirable collection de minéraux parfaitement classée, qu’il conserve, entretient et enrichit tous les jours avec la passion d’un amateur et la tendresse d’un père.

Je vous ai dit qu’il avait toujours échappé au sacrement de l’ordre. Il est cardinal-diacre. Les bonnes âmes, qui veulent absolument que tout soit bien à Rome, font sonner bien haut l’avantage qu’il a de n’être pas prêtre. Si on l’accuse d’être trop riche : d’accord, répondent ces chrétiens indulgents ; mais souvenez-vous qu’il n’est pas prêtre ! Si l’on trouve qu’il a lu Machiavel avec profit : il n’est pas prêtre ! Si le public cite un peu souvent ses bonnes fortunes : il n’est pas prêtre ! Je ne savais pas que les diacres eussent le privilège de tout faire impunément. À ce prix, que ne nous permettra-t-on point, à nous qui ne sommes pas même tonsurés ?

Ce mortel heureux a une faiblesse, mais elle est bien naturelle : il craint la mort.

Un seul homme a osé menacer une vie si précieuse à elle-même ; c’était un misérable idiot. Poussé par les sociétés secrètes, il se posta dans l’escalier du Vatican et attendit le cardinal au passage. Le moment venu, il tira de sa poche, avec de grandes difficultés, une fourchette. Le cardinal aperçut l’arme et fit un bond en