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vit et vivifie ; on peut travailler pour ses beaux yeux.

Si je m’étonne de quelque chose, c’est de rencontrer à Rome un certain nombre d’artistes de talent comme M. Tenerani dans la statuaire, M. Podesti dans la peinture, M. Castellani dans l’orfèvrerie, MM. Calamatta et Mercuri dans la gravure. Ils ne sont pas les seuls ; je ne cite que les plus célèbres. Mais la triste majorité des artistes romains languit, faute d’encouragement, dans une industrie monotone et un commerce avilissant ; occupée la moitié du jour à recopier des copies, et le reste du temps faire l’article aux étrangers.

En résumé, j’avais emporté de Rome une assez pauvre idée de la classe moyenne. Quelques artistes distingués, quelques avocats de talent et de courage, quelques médecins savants, quelques fermiers riches et capables, ne suffisaient pas, à mon sens, pour constituer une bourgeoisie ; ils ne formaient qu’une exception. Or il n’y a pas de nation sans bourgeoisie et je tremblais de reconnaître à la fin qu’il n’y a pas de nation italienne.

Dans les provinces de la Méditerranée, la bourgeoisie ne me parut pas plus florissante qu’à Rome. Les gens de la classe moyenne, demi-bourgeois, demi-manants, sont plongés dans une ignorance épaisse. Ils ont à peu près de quoi vivre sans se brûler au soleil ; ils restent donc chez eux, dans une maison mal meublée, où l’ennui suinte des murailles. Les bruits de l’Europe, qui pourraient les éveiller, s’arrêtent à la frontière. Les idées nouvelles, qui pourraient féconder leur esprit, sont in-