Aller au contenu

Page:About - Le Roi des montagnes.djvu/160

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

il s’en alla voir les blessés et extraire de ses propres mains la balle de Sophoclis. Ordre fut donné à tous les bandits de nous traiter avec les égards dus à notre argent.

Le déjeuner que je fis sans témoins, dans la compagnie de ces dames, fut un des plus joyeux repas dont il me souvienne. Tous mes maux étaient donc finis ! Je serais libre après deux jours de douce captivité. Peut-être même, au sortir des mains d’Hadgi-Stavros, une chaîne adorable !… je me sentais poète à la façon de Gessner. Je mangeai d’aussi bon cœur que Mme Simons, et je bus assurément de meilleur appétit. Je donnai sur le vin blanc d’Égine comme autrefois sur le vin de Santorin. Je bus à la santé de Mary-Ann, à la santé de sa mère, à la santé de mes bons parents et de la princesse Ypsoff. Mme Simons voulut entendre l’histoire de cette noble étrangère, et, ma foi, je ne lui en fis pas un secret. Les bons exemples ne sont jamais trop connus ! Mary-Ann prêta à mon récit l’attention la plus charmante. Elle opina que la princesse avait bien fait, et qu’une femme doit prendre son bonheur où elle le trouve. La jolie parole ! Les proverbes sont la sagesse des nations et quelquefois leur bonheur. J’étais lancé sur la pente de toutes les prospérités, et je me sentais rouler vers je ne sais quel paradis terrestre. Ô Mary-Ann ! les matelots qui naviguent sur l’Océan n’ont jamais eu pour guides deux étoiles comme vos yeux !

J’étais assis devant elle. En lui faisant passer une aile de poulet, je m’approchai tellement, que je vis mon image se refléter deux fois en miniature entre ses cils noirs. Je me trouvai beau, monsieur, pour la première fois de ma vie. Le cadre