Page:About - Le Roi des montagnes.djvu/239

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— C’est une idée ! Après-demain, au bal de la cour ! Vous êtes invité, moi aussi. La lettre vous attend sur votre table, chez Christodule. D’ici là mon garçon, il faut rester à mon bord pour vous refaire un peu. Vos cheveux sont roussis et vos pieds endommagés : nous avons le temps de remédier à tout. »

Il était six heures du soir lorsque le grand canot de la Fancy nous mit tous à bord. On porta le Roi des montagnes jusque sur le pont. Il ne se soutenait plus. Photini se jeta dans ses bras en pleurant. C’était beaucoup de voir que tous ceux qu’elle aimait avaient survécu à la bataille, mais elle trouva son père vieilli de vingt ans. Peut-être aussi eut-elle à souffrir de l’indifférence de Harris. Il la remit au Roi avec un sans-façon tout américain, en lui disant :

« Nous sommes quittes. Vous m’avez rendu mon ami, je vous restitue mademoiselle. Donnant, donnant. Les bons comptes font les bons amis. Et maintenant, auguste vieillard, sous quel climat béni du ciel irez-vous chercher qui vous pende ? Vous n’êtes pas homme à vous retirer des affaires !

— Excusez-moi, répondit-il avec une certaine hauteur : j’ai dit adieu au brigandage, et pour toujours. Que ferais-je dans la montagne ? Tous mes hommes sont morts, blessés ou dispersés. J’en pourrais lever d’autres ; mais ces mains qui ont fait ployer tant de têtes me refusent le service. C’est aux jeunes à prendre ma place ; mais je les défie d’égaler ma fortune et ma renommée. Que vais-je faire de ce restant de vieillesse que vous m’avez laissé ? Je n’en sais rien encore ; mais soyez sûrs que mes derniers jours seront bien remplis.