Page:About - Le Roi des montagnes.djvu/72

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eux toute une ménagerie de petits animaux agiles, capricieux, insaisissables, qui leur tiennent compagnie nuit et jour, les occupent jusque dans le sommeil, et, par leurs bonds et leurs piqûres, accélèrent le mouvement des esprits et la circulation du sang. Les puces des brigands, dont je puis vous montrer quelques échantillons dans ma collection entomologique, sont plus rustiques, plus fortes et plus agiles que celles des citadins : le grand air a des vertus si puissantes ! Mais je m’aperçus trop tôt qu’elles n’étaient pas contentes de leur sort et qu’elles trouvaient plus de régal sur la peau fine d’un jeune Allemand que sur le cuir tanné de leurs maîtres. Une émigration armée se dirigea sur mes jambes. Je sentis d’abord une vive démangeaison autour des chevilles : c’était la déclaration de guerre. Dix minutes plus tard, une division d’avant-garde se jeta sur le mollet droit. J’y portai vivement la main. Mais, à la faveur de cette diversion, l’ennemi s’avançait à marches forcées vers mon aile gauche et prenait position sur les hauteurs du genou. J’étais débordé, et toute résistance devenait inutile. Si j’avais été seul, dans un coin écarté, j’aurais tenté avec quelque succès la guerre d’escarmouches. Mais la belle Mary-Ann était devant moi, rouge comme une cerise, et tourmentée peut-être aussi par quelque ennemi secret. Je n’osais ni me plaindre ni me défendre ; je dévorai héroïquement mes douleurs sans lever les yeux sur miss Simons ; et je souffrais pour elle un martyre dont on ne me saura jamais gré. Enfin, à bout de patience et décidé à me soustraire par la fuite au flot montant des invasions, je demandai à comparaître devant le Roi. Ce mot rappela nos guides à leur devoir.