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Page:About - Les mariages de Paris, 1856.djvu/134

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128 TERRAINS A VENDRE. comme toutes les Parisiennes, et elle vivait depuis B1 longues années dans l'espérance d'un jardin. Par un singulier caprice de la nature, cette enfant, née de parents ineptes, avait tous les besoins de la vie élé¬ gante. Elle se serait passée de pain plus volontiers que de musique, et elle j ugeait les fleurs plus utiles que les chaussures. Ses yeux s'allumaient à la vue d’un bel attelage, quoiqu’elle ne fût jamais sortie qu’à pied ou en omnibus. Elle aimait la toilette, sans avoir jamais fait de toilette ; elle dansait un peu tous les soirs en imagination, quoiqu'on ne i’eût ja¬ mais conduite au bal ; elle achetait tous les parcs et tous les châteaux qu'elle voyait à vendre sur la qua¬ trième page du\tConsUtiUionml.Avec de pareils goûts, elle eût été fort à plaindre sans les espérances bien ondées qui la soutenaient. Une vie de privations, ses instincts perpétuellement froissés auraient aigri son cœur jusqu'au fond, et donné à ses idées cette teinte grisâtre qu'on observe chez les vieilles filles. Mais elle connaissait la fortune de son père ; elle était sûre de l’avenir; elle se consolait en jetant un coup d’œil sur ce grand terrain nu qui était tout son horizon. Elle avait pris pour devise ; Un temps viendra ! et elle vi¬ vait d’espoir. Elle s'était fait, au fond de son âme, une retraite délicieuse où rien ne lui manquait, pas même l'amour d'un beau jeune homme, qui ne tarde- . rait pas à se présenter. Ainsi retranchée, elle prenait en patience les soins du ménage, les travaux de cou- « , ■Í .