Page:About - Les mariages de Paris, 1856.djvu/251

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LE BUSTE.\t245 carnaval. Mme Michaud et Mme Lerambert perdaient beaucoup à se montrer si matin, et la file du banquier ne garda pas toutes ses illusions sur la personne de M. Lefébure. Mais Victorine y trouva son compte. Lorsqu’elle entra, en cheveux et sans corset, dans un long peignoir de percale brodée, elle parut aussi belle que Mlle Rachel au cinquième acte de Polyeucte. Les premiers mots qu’elle entendit lui apprirent ce qui se passait. Elle fut violemment émue, non de crainte, mais d’audace. « Rassurez-vous, dit-elle; ii ne lui arrivera rien. Je le connais, c’est l’homme invincible. — Mon frère? demanda Mlle de Marsal. — Il ne s’agit pas de votre frère ; mais n’ayez pas peur, mademoiselle : Daniel lui fera grâce ! » Si les lionnes causent ensemble dans le désert, c’est ainsi qu’elles doivent parler des lions. Tout l’au¬ ditoire ouvrit de grands yeux. Victorine ne se fit pas ■ prier pour dire son secret : une femme ne rougit point d’aimer l’homme qui se bat pour e ■ le. Elle raconta à son père l’histoire si courte et si pleine du mois qui venait de s’écouler, la discrétion admirable de Daniel, et son courage, et tout le talent que l’amour lui avait donné. M. de Guéblan songeait à part lui qu’il avait pris trop de soin de ses affaires et trop peu de sa maison; Mme Michaud se trouvait sotte, M. Lefébure se frottait les yeux, et Mlle de Marsal ne savait plus si elle devait s effrayer ou se scandaliser. La passion