Page:About - Les mariages de Paris, 1856.djvu/301

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tites en fleur — c’était dans l’été de 1834 — sa fille passa en courant auprès d’elle. Elle arrêta l’enfant par sa robe et la baisa cinq ou six fois, en se reprochant de songer moins à sa fille qu’à ses chagrins. Lorsqu’elle l’eut bien embrassée, elle la regarda en face et fut satisfaite de l’examen. À quatre ans et demi, la petite Lucile annonçait une beauté fine et aristocratique. Ses traits étaient charmants ; les attaches des pieds et des mains, exquises. Éliane eut beau fouiller dans sa mémoire, elle ne se souvint pas d’avoir vu jouter aux Tuileries un seul enfant d’un type aussi distingué. Elle donna un dernier baiser à la petite, qui prit sa volée. Puis elle s’essuya les yeux, et depuis elle ne pleura plus.

« Mais où donc avais-je la tête ? murmura-t-elle en reprenant son plus heureux sourire. Tout n’est pas perdu ; tout peut s’arranger ; tout est arrangé ; c’est bien ; c’est pour le mieux ! J’entrerai ; c’est une affaire de patience ; il faut du temps, mais ces portes orgueilleuses s’ouvriront devant moi. Je ne serai pas marquise, non ; j’ai été assez mariée, et l’on ne m’y reprendra plus. La marquise, la voilà qui piétine dans les fraises. Je lui choisirai un marquis, un bon : il faut bien que mon expérience serve à quelque chose. Je serai la vraie mère d’une vraie marquise ! Elle sera reçue partout, et moi aussi ; fêtée partout, et moi aussi ; elle dansera avec des ducs, et moi… je la regarderai danser, à moins que ces messieurs