344\tLA\tMÈRE DE LA MARQUISE. Lucile devina la trahison ; mais elle avait trop peur de sa mère pour lui répondre autrement que par des larmes. « Votre mari, poursuivit la veuve, est un ob¬ stiné qui refusait de vous conduire dans le monde. C’est dans votre intérêt que je lui ai forcé la main. Il vous aura rejointe dans vingt-quatre heures, s’il vous aime. 11 n’y a pas là de quoi pleurer comme une Agar dans le désert. Je suis votre mère, je sais mieux que vous ce qui vous convient ; je vous mène à Paris ; je vous sauve d’Arlange. 8¬ — 0 mon pauvre bonheur ! s’écria l’enfant en tor¬ dant ses mains. — De quoi vous plaignez-vous ? Vous l’aimiez , vous l’avez épousé. Vous êtes mariée ! Que vous faut- il de plus ? — Ainsi, dit Lucile, voilà donc le mariage ! Ah ! j’étais bien plus heureuse quand j’étais fille : je voyais mon mari ! » D’Arlange à Paris, elle ne se lassa point de regar¬ der par la portière. Il lui semblait impossible que Gaston ne ’ût pas à sa poursuite. Dans chaque voi¬ ture qui soulevait la poussière de la route,' sur tous les chevaux qui accouraient au galop derrière la ber¬ line, elle croyait reconnaître son mari. Ce voyage, qui étouffait de joie sa triomphante mère, fut pour elle une série interminable d’espérances et de décep¬ tions. Paris, sans Gaston, lui parut une immense so¬ litude, et le faubourg Saint-Germain, abandonné par
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