LA MÈRE DE LA MARQUISE.\t371 fi Mais d’où vient-il? Il faut qu'il ait couru : il est en nage. » Et, d’un geste aussi prompt que la parole, elle
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passa un mouchoir de batiste sur le front du jeune homme, qui essayait en vain de se défendre. M. Jordy avait plus de monde que Céline ; mais il eut beau lui lancer des regards qui voulaient être sévères, la petite indigène d’Arlange lui mit les deux mains sur les yeux et baisa effrontément ses paupières fermées. « Ne me gronde pas, lui dit-elle : Lucile est mariée depuis quinze ours, c’est-à-dire aussi folle que nous. » La pendule sonna midi ; c’était l’heure du déjeuner. On courut au jardin et l’on s’attabla joyeusement sous ces beaux tilleuls qui ont donné leur nom à la rue voisine. Aucun domestique n’assistait au repas ; cha¬ cun se servait soi-même et servait les autres. Les deux amies, élevées au vi lage et étrangères aux mièvreries de l’éducation parisienne, n’étaient pas des buveuses d’eau ; elles trempèrent leurs lèvres dans un joli vin paillé que M. Jordy allait chercher à quelques pas de là dans un ruisseau d’eau courante. Robert plut facilement à la marquise : sans manquer d’esprit ni d’éducation, il était simple , plein de cœur, et du bois dont on fait les meilleurs amis. Du reste, nous éprouvons tous une sympathie naturelle pour tous les fronts où rayonne la joie : il n’y a que les égoïstes qui n’aiment pas les heureux. Céline, qui voulait faire briller son mari, le força de chanter au dessert. Il choisit une des plus belles chansons de