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toire et la sienne, et qu’il m’apprendrait du haut de ses échasses mille choses intéressantes dont je ne me doutais pas, ni vous non plus ? Je ne regrette point le temps que j’ai passé dans sa compagnie. Ce que j’ai vu de plus curieux dans mon tour de France, c’est le désert des Landes et maître Pierre son prophète.

Le voyage commença sous les meilleurs auspices, car de Paris à Bordeaux je ne fis qu’un somme. Je m’endormis dans la gare de Paris, précisément à l’heure où Mme  Ristori opérait sa rentrée au Théâtre-Italien. Chemin faisant, mes rêves furent interrompus quatre ou cinq fois par le cri des employés qui signalaient à notre admiration les principales villes de France. Orléans, Tours, Poitiers, Angoulême se ressemblent un peu, lorsqu’on les voit en se frottant les yeux, à la portière d’un wagon. Ces vieilles cités historiques présentent l’aspect uniforme d’un hangar neuf, planté sur des colonnettes de fonte, éclairé au gaz, et peuplé de casquettes brodées qui courent dans tous les sens.

Si j’ai vu quelque chose de plus à Bordeaux, c’est que j’étais descendu de voiture.

Je m’éveillai au bord d’un fleuve énorme, qui serait la parfaite image de la Tamise si les eaux de la Tamise étaient jaunes, ou si le limon de la Gironde était noir. Le pont qui joint les deux rives est long d’un demi-quart de lieue, mais on y voit