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nature, mais ils dessinent comme elle : ils lui empruntent ses procédés ; ils descendent, comme elle, de l’ensemble au détail, du général au particulier. Je vous ai montré cet homme qui s’avançait vers nous sur une grande route. Priez un grand dessinateur de nous faire son portrait. Du plus loin qu’il apercevra le modèle, il ébauchera par quelques lignes hardies l’aspect général de son corps. M. Ingres disait à ses élèves : « Lorsqu’un couvreur tombe d’un toit, profitez du moment où il est encore en l’air pour prendre votre crayon et dessiner les quatre lignes. » À mesure que le modèle approche, les masses se dessinent, le portrait avance. Arrêtez l’homme à moitié chemin, le portrait ne sera qu’ébauché, mais c’est déjà un portrait. Donnez au peintre le temps d’achever son ouvrage, le portrait ne change pas ; l’ensemble est trouvé, les détails n’y gâtent rien. On vous peindra, si vous le désirez, tous les poils de la barbe, et le grain de la peau, et le reflet d’une fenêtre dans la prunelle de l’œil. Du moment où l’on a saisi et rendu les masses, le dessin peut être impunément peu ou beaucoup fini : c’est un vrai dessin. Mais il est plus facile de disserter sur les masses que de les peindre. Il y avait en Grèce une ville appelée Corinthe : on en parlait beaucoup, mais tout le monde n’y arrivait pas.

Lorsqu’il s’agit de peindre, non pas un portrait isolé, mais une réunion d’hommes, une assemblée,