Page:Abregé de la vie des peintres (Roger de Piles, Muguet, 1699).djvu/42

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de clair, & les grains du côté oppoſé font une maſſe d’ombre, & que le tout ne forme qu’un groupe & comme un ſeul objet ; en ſorte neanmoins qu’en cet artifice il ne paroiſſe aucune affectation : mais que les objets ſe trouvent ainſi ſituez naturellement & comme par hazard. 3. Par les accidens d’une lumiere ſuppoſée. Et 4. enfin par la nature & le corps des couleurs que le Peintre peut donner aux objets ſans en alterer le caractére. Cette partie de la Peinture eſt le plus grand moyen dont le Peintre ſe puiſſe prévaloir pour donner de la force à ſes ouvrages, & pour rendre ſes objets ſenſibles tant en general qu’en particulier.

Je ne vois pas que l’artifice du Clair-obſcur ait été connu dans l’Ecole Romaine avant Polydore de Caravage, qui le trouva & qui s’en fit un principe : & je ſuis étonné que les Peintres qui l’ont ſuivi ne ſe ſoient pas aperçus que le grand effet de ſes ouvrages vient des repos qu’il a obſervez d’eſpace en eſpace, en groupant ſes lumieres d’un côté & ſes ombres d’un autre, ce qui ne ſe fait que par l’intelligence du Clair-obſcur. Je fuis étonné, dis-je, qu’ils ayent laiſſé échaper cette partie ſi néceſſaire, ſans s’en apercevoir. Cela n’empeche