Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/102

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phère nouvelle j quel calme et quelle sérénité ! Plus de froide ironie, plus de mots desséchants, plus d’images suspectes : le licencieux et le sceptique avaient à la fois disparu.

Est-il besoin de dire qu’à partir de ce jour le succès ne se fit plus attendre ? Vous aviez trouvé votre voie ; vous étiez sur votre terrain ; dans les salons, dans les châteaux, et même aussi dans des rangs plus modestes, partout on vous acceptait comme héritier légitime de celui qui semblait s’éteindre, et comme un héritier offrant des garanties, des sûretés que lui-même ne donnait pas toujours. Vous ajoutiez, j’ose dire, à tous les agréments de ses petits chefs-d’œuvre une sorte d’attrait de plus, un charme de bienséance qui rendait le plaisir complet.

C’est ainsi que, pendant près de dix années, vous avez fait successivement passer sous les yeux d’un public de jour en jour plus bienveillant l’élégante série de vos esquisses dramatiques. Je voudrais pouvoir m’arrêter à les décrire une à une, et montrer de quelle main délicate vous combinez votre tissu et dessinez vos personnages, avec quel art vous animez votre dialogue, de quels traits vous l’assaisonnez ; mais, sans compter que cette étude exigerait beaucoup de temps, ce serait prendre, à vrai dire, presque un soin superflu. Je suis en face d’un auditoire qui sur tous ces points-là n’a pas besoin que je l’instruise, et qui bien plutôt, je suppose, pourrait me donner des leçons. Vous avez, en effets cet avantage singulier sur la plupart des auteurs dramatiques, que vos acteurs et vos actrices ne sont pas seulement au théâtre. En tout lieu, et surtout dans d’élégantes réunions, vous êtes à peu près certain de rencontrer des gens qui non-seulement vous ont lu, vous connaissent