funeste ou bienfaisant pour l’éducation générale des esprits.
Je sais qu’il nous donnait, à quelques camarades épris de
littérature et à moi-même, une heure exquise lorsque notre
professeur substituait à la sèche matière un fragment d’un
poète contemporain qu’il nous demandait de traduire. C’est
ainsi que nous fut dictée un jour votre délicieuse Chanson du Vannier,
celle qui a pour refrain :
Brins d’osier, brins d’osier,
Courbez-vous assouplis sous les doigts du Vannier…
Je me rappelle, comme si cette révélation datait d’hier,
l’enchantement qui saisissait nos jeunes têtes, à mesure
que se déroulaient les stances où vous racontez les métamorphoses
de ces frêles baguettes, devenues sous la
main du rustique artiste un berceau où faire dormir un
enfant, une corbeille où ramasser le trésor parfumé des
fraises mûres, un van où secouer les épis de blé, une cage
où garder un oiseau siffleur, me nasse où surprendre la
truite frémissante, une claie où coucher le vannier lui-même :
… Et vous serez aussi, brins d’osier, l’humble claie
Où, quand le vieux vannier tombe et meurt, on l’étend
Tout prêt pour le cercueil. — Son convoi se répand
Le soir dans les sentiers où verdit l’oseraie…
Ce paysage, apparu derrière chacune de ces rimes, nous le reconnaissions. Ces vertes et pâles lignes des saules, elles bordaient les routes où nous cheminions, deux par deux, le jeudi et le dimanche. Ces vignes que vous nous décriviez, s’empourprant à l’automne, nous les avions vendan-