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Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/111

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sur un brancard, ni la saignée, ni le pansement. Une jolie femme ne se serait pas mieux évanouie.

Belle-Rose rougit légèrement.

– Mais, continua la dame, vous tombiez donc des nues quand vous avez si brusquement fait pirouetter Adonis ?

Belle-Rose avait tout oublié. La question de la dame rendit à ses souvenirs toute leur vivacité. Il revit à la fois son duel, son départ, sa fuite, et se tut, mesurant par la pensée la solitude et le malheur où sa vie venait d’être plongée.

– Oh ! je ne vous demande pas votre secret, continua son interlocutrice : vous m’avez sauvé la vie, c’est bien le moins que vous ayez le droit de garder le silence. Mais, sur mon âme, l’homme qui a failli causer ma mort, après avoir presque tué M. de Villebrais, a maintenant un double compte à me rendre.

Belle-Rose regarda la dame avec étonnement. Elle avait les sourcils froncés, les lèvres contractées, et sur ses joues une rougeur fébrile venait de chasser la pâleur.

– M. de Villebrais ! s’écria Belle-Rose en se soulevant.

– Le connaissez-vous ? reprit l’inconnue.

– Un officier d’artillerie ? ajouta le blessé.

– Précisément. Un officier d’artillerie que j’attendais au château ; son meurtrier s’est enfui ; mais je saurai bien l’atteindre où qu’il se cache.

– C’est donc à sa vie que vous en voulez, madame ?

– Certes ! après le crime, il faut le châtiment.

– Prenez-la donc ! s’écria Belle-Rose, car celui que vous cherchez, c’est moi !

– Vous ! mais vous l’avez donc frappé par derrière !

– J’ai frappé M. de Villebrais de face, l’épée froissant l’épée, et, si je l’ai frappé, c’est parce qu’il avait insulté une femme.

– Quelque grisette !

– Ma sœur, madame.