Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/145

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vous vois jamais, ce sera pour lui obéir et prêt à tout. Ce qu’il aura voulu, je le voudrai ; faites en sorte que je ne sois point forcé de vous haïr.

« BELLE-ROSE. »


Mme de Châteaufort se renversa en arrière, pâle, inanimée. Elle n’avait plus ni voix pour se plaindre, ni larmes pour pleurer ; une fièvre ardente la dévorait. Cependant Belle-Rose, laissant son cheval au premier relais, prit un bidet de poste, et, faisant diligence, arriva le lendemain à Cambrai, où se trouvait alors le régiment de M. de Nancrais. M. de Nancrais travaillait dans sa chambre lorsque Belle-Rose se présenta devant le planton de service. Au son de sa voix, M. de Nancrais sauta de sa chaise et courut lui-même ouvrir la porte ; à peine Belle-Rose l’eut-il passée, que son capitaine la repoussa violemment.

– Tu viens lorsqu’on ne t’attendait plus, s’écria-t-il ; mais tu as jugé sans doute qu’il n’était jamais trop tard pour se faire pendre !

– On me jugera, monsieur le vicomte, mais ce n’est pas là le seul motif qui m’amène.

– Parbleu ! c’est le seul qui te retiendra !… Si tu ne te souviens plus de l’odeur de la poudre, on te la fera sentir d’assez près pour que tu n’aies plus envie de l’oublier.

– Permettez-moi de croire que la chose n’est pas encore faite.

– Eh ! morbleu ! c’est tout comme ! Tu as pris soin d’arranger ton affaire de façon à éviter toute incertitude. Va-t’en au diable ! Tu appliques un grand coup d’épée à ton lieutenant, et tu désertes après ! Mais il n’en faut pas la moitié pour faire fusiller un homme ! Ne pouvais-tu rester où tu étais ?

– J’y suis resté trop longtemps.

– Alors il y fallait rester toujours !… L’idée d’être honnête homme te prend un peu tard, mon drôle !

– Capitaine !