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Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/176

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commandement d’un corps de recrues qui venait d’être conduit à Cambrai.

– Je vous devancerai à la tête de mes vieux soldats, lui dit le capitaine ; vous me rejoindrez à Charleroi, et le plus tôt sera le mieux.

Belle-Rose aurait mieux aimé partir sur-le-champ, mais il fallait obéir ; la mission dont il était chargé était d’ailleurs une preuve de confiance ; il se résigna et vit s’éloigner à la même heure Cornélius et M. de Nancrais, celui-là pour Saint-Omer et celui-ci pour Charleroi. On devinera sans doute que le caporal la Déroute n’avait pas été le dernier à venir complimenter Belle-Rose sur son nouveau grade.

– Je ne pense guère à l’épaulette, avait dit le pauvre caporal ; la seule chose que j’ambitionne à présent, c’est d’être sous vos ordres. Si vous me permettiez de ne plus vous quitter, je serais le plus heureux des hommes.

– C’est à quoi nous aviserons quand nous serons à l’armée. M. de Nancrais m’accordera, j’en suis certain, cette autorisation, qui ne me fera pas moins plaisir qu’à toi.

Après cette assurance, la Déroute, plein de joie, prit le chemin des remparts, où se rangeait la compagnie. Comme il allait se mettre à son rang, M. de Nancrais l’appela.

– Eh ! drôle ! où cours-tu ? lui dit-il.

– Je cours à mes soldats… J’ai perdu un peu de temps, mais je vous payerai ça à coups de pique dans le ventre des Espagnols.

– Il s’agit bien de pique et d’Espagnols ! Qu’as-tu fait de ta hallebarde ?

– Ma hallebarde ? répéta le caporal stupéfait.

– Parbleu, je m’exprime en français, j’imagine ! On ne t’a donc pas dit que tu étais sergent, ou bien l’as-tu oublié ?

– Moi ! sergent !

– Voilà trois heures que tu es nommé.