Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/245

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murmure du feuillage qu’agitait le vent. Geneviève épouvantée se laissa tomber sur ses genoux.

– Mon Dieu ! dit-elle, est-ce l’âme de Gaston qui m’appelle ?

Belle-Rose sentit un frisson courir à la racine de ses cheveux que mouillait une sueur froide. Il s’élança vers la fenêtre et l’ouvrit. La nuit sereine enveloppait la campagne de sa transparente obscurité ; la brise chantait entre les rameaux fleuris des aubépines, et l’on entendait dans l’ombre d’une haie une fauvette amoureuse qui gazouillait sur son nid. Une terreur invincible retenait Geneviève agenouillée par terre ; elle avait la pâleur du marbre, sa tête renversée en arrière semblait aspirer encore l’horreur de ce cri, et ses mains perdues dans son épaisse chevelure en tordaient les boucles flottantes. Belle-Rose sondait du regard les profondeurs de la nuit ; sa main s’était portée à la garde de son épée, et ce soldat qui ne connaissait pas la peur attendait muet et frémissant. Un nouveau cri, un cri lugubre, éclata soudain et se prolongea sous le ciel étoilé : c’était tout à la fois une plainte déchirante et une menace formidable, un cri qui figeait le sang. Mme de Châteaufort, folle d’épouvante, bondit jusqu’aux genoux de Belle-Rose et s’y cramponna. Tout à coup la porte s’ouvrit violemment, et Pierre se précipita dans la chambre l’épée nue au poing ; Camille, effarée, s’y jeta après lui.

– Entends-tu, frère ? dit à voix basse le pâle jeune homme ; entends-tu ?

Belle-Rose se dégagea de l’étreinte de Mme de Châteaufort et tira son épée.

– Viens, frère ! dit-il ; et tous deux se jetèrent hors du pavillon.