Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/467

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– Sans doute ?… Mais, au fait, vous ne savez pas la moitié de ce qui s’est passé ! Au récit de M. de Charny il manque un dénoûment… C’est toute une histoire, monseigneur !

Le sang-froid de M. de Pomereux étourdissait M. de Louvois ; il avala un grand verre d’eau et faillit briser le gobelet en le remettant sur la table.

– Voulez-vous que je vous la conte ? reprit le jeune gentilhomme.

– Contez, mais dépêchez-vous, répondit M. de Louvois qui frappait le parquet à coup de talon.

– Oh ! ce ne sera pas long ! Figurez-vous donc qu’après avoir quitté M. de Charny à Pontoise, je suis allé trouver à Chantilly monseigneur le prince de Condé, qui a toujours été plein de bonté pour ma famille ; nous en avons mille preuves que je pourrais citer.

– Passons là-dessus.

– Soit, ce récit blesserait ma modestie. Je lui ai exprimé le désir que j’avais d’entrer dans sa maison ; il y avait tout juste une charge de capitaine des chasses vacantes ; il me l’a offerte, je l’ai acceptée, et je suis entré en fonctions hier matin.

M. de Louvois se promenait par la chambre, l’œil en feu et le sourcil froncé.

– J’ai même forcé un cerf dix-cors pour mes débuts, et ce matin, continua tranquillement M. de Pomereux, monseigneur le prince de Condé m’a expédié à Paris pour terminer certaines affaires qui le concernent particulièrement. Vous comprenez bien que si j’accepte votre offre d’aller à la Bastille, dans le but de me justifier, les affaires du prince en souffriront. Or, mes intérêts doivent passer, je crois, après les siens. Le prince de Condé est prince du sang, monseigneur.

M. de Louvois allait et venait par la chambre comme une bête fauve ; la colère s’amassait dans son sein. Tout à coup, il lui vint dans la pensée que M. de Pomereux,