Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/533

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– En avant ! répétèrent les gentilshommes, l’épée haute.

– Eh ! dit Grippard, je crois que nous sommes un contre vingt, et ils ont la position pour eux.

– Avance d’abord et compte après ; cet enfant y pense-t-il, lui ? répondit la Déroute en montrant du doigt le chevalier de Vendôme qui piquait son cheval de la pointe de son épée pour le faire nager plus vite.

Le chevalier de Vendôme avait alors dix-sept ans. Grippard s’affermit sur ses étriers, et, tout honteux de son observation, fit comme le chevalier. À la vue de cette petite troupe qui s’avançait hardiment contre eux, les trois escadrons hollandais descendirent vers le fleuve et entrèrent dans l’eau jusqu’aux étriers. En ce moment, le prince de Condé fit un signe, et M. de Revel plongea dans le Rhin à la tête de ses cuirassiers. Le fleuve était aux trois quarts franchi ; le passage n’était plus un problème.

– C’est un vaillant soldat, et s’il n’est pas tué, nous le présenterons au roi, dit le prince de Condé au duc de Luxembourg.

Belle-Rose et les braves jeunes gens qui l’accompagnaient ne s’effrayèrent pas de la différence du nombre. Poussant leurs chevaux, ils abordèrent résolument l’ennemi aux cris de : Vive le roi ! Leurs pistolets étant mouillés, l’épée seule leur restait : mais ils la maniaient en gens de cœur. Un instant on put croire que cette poignée d’hommes allait être anéantie par ces trois escadrons. Mais il arriva ce qui arrive souvent dans ces périlleuses circonstances : l’audace des uns intimida les autres. Les Hollandais exécutèrent une décharge et se débandèrent aussitôt. Les pieds des chevaux mordirent sur le rivage, et les quarante cavaliers s’élancèrent sur l’ennemi. On se joignit corps à corps, et la mêlée devint terrible.

– Nous sommes entre l’eau et le feu ! dit la Déroute, dont la bonne figure était rouge de joie.