Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/351

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Allemagne connût le héros qui l’a sauvée de l’esclavage ; mais si son âme est là-haut, il faut du moins que sa dépouille mortelle soit rendue à la Suède.

— Voilà une heure que je cherche celui qui fut Gustave-Adolphe. Hélas ! qui sait ce qu’il est devenu ?

— Suivez-moi, et si vous ne le trouvez pas, moi je le trouverai.

Marguerite poursuivit sa marche d’un pas ferme, passant au milieu des morts renversés les uns sur les autres. Son visage avait l’aspect du marbre.

« Ah ! que je l’ai vue heureuse et belle ! pensait Armand-Louis. »

La fille d’Abraham Cabeliau arriva ainsi auprès d’un amas de cadavres groupés dans toutes les attitudes de la mort. La terre était toute imbibée de sang et couverte de débris d’armes.

Ce n’était que mousquetaires et cuirassiers entassés pêle-mêle, tous criblés de blessures, mutilés, éventrés, la tête fendue, le visage encore empreint de furie.

Marguerite chercha dans cet amoncellement de corps méconnaissables, çà et là labourés par les fers de mille chevaux.

Tout à coup, elle tomba à genoux, et, soulevant dans ses bras une tête froide voilée des ombres de la mort :

— Le voilà ! dit-elle.

Il y avait tant de larmes et de douleur dans ce seul cri, que Magnus détourna la tête et se mit à pleurer.

Mais alors Marguerite se redressant et jetant derrière sa tête le long voile qui lui faisait comme un linceul, les yeux noyés de larmes, le visage en feu :

— Et celui qui a tué ce héros, il vit peut-être ! s’écria-t-elle. Dieu du ciel, où est Ta justice ?

M. de la Guerche lui saisit la main :