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LUC

gages de Déah Swindor ou l’ami canaille de Julien Bréard. Elles mentent, ces femelles en rupture de lavoir ; elle savent bien reconnaître, elles qui hurleraient de joie sous un soufflet de lui, la pureté de ses lèvres et la tranquillité neuve de ses yeux. Elles ne supportent pas, sirènes éraillées, le charme captivant de sa voix, et la perfection de son talent ne vainc point leurs sales plaisanteries. Une grande fille effrontée, Ryta Girly avait juré de l’avoir, mais Luc ne se souciait pas de ses restes puant le crottin des jockeys et des palefreniers. Il craignait aussi les stigmates possibles du grand Totor, sorte d’hercule dont Ryta avait fait son amant de cœur malgré, — à cause peut-être, sait-on jamais avec les femmes ? — les pustules que jette à sa face de crapule l’acreté de son sang.


Depuis les répétitions costumées, chaque jour Lucet était épié ; les femmes à tour de rôle, montaient jusqu’à sa loge dont la porte fermait par caprices ; et ce leur était une joie de le surprendre au moment où, devant la glace qui tient toute la hauteur du mur, il se révélait à lui-même sa nudité en se déshabillant. L’avant-veille de la première, dans l’impasse étroite d’un praticable, Ryta Girly avait hasardé sa main avide sous la tunique de Lucet avec une telle précision audacieuse, en ajoutant au geste la parole obscène, que l’enfant exaspéré lui avait craché en pleine figure. Il s’attendait, en retour, à quelque énormité de cette garce. Mais le crachat était tombé juste sur sa bouche, elle affecta d’en boire goulûment la tiédeur en fermant ses yeux plombés dans un spasme. Lucet haussa les épaules de mépris ;