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PARTENZA…

lement contre un pan de mur sous la veilleuse de la porte basse, et finis par m’asseoir comme un voyageur fatigué, comme un pauvre, sur un degré de marbre devant la grille qui ferme la Loggia… Dante Alighieri est venu souvent méditer aux environs de cette place, on dit sur cette place même, sur une pierre conservée pieusement depuis, que j’ai touchée sans doute il n’y a qu’un instant, moi atome dont rien ne sera plus dans quelques années, dans quelques jours, peut-être dans quelques heures… Et tout ce que j’ai vu, aimé, continuera d’être, à peine modifié par le temps en marche vers la Fin… Et longtemps je reste les regards attachés sur cette tour de Giotto que Pétrarque, le tendre poète de Laure, a vu petit à petit s’élever dans les airs où je discerne en ce moment les dessins des marbres obscurs, combinés avec les clartés des marbres aux nuances pâles qui sommeillent dans l’ombre, entre les colonnettes. J’évoque tous les noms, tous les êtres, si lointains dans le passé, qui vinrent là, heurter, contre les murailles fastueuses du Dôme, leurs regards, comme les miens s’y abandonnent à cette heure et vont chercher les statues immobiles dans leurs niches, compagnes élégantes et muettes, pour revoir ensemble, elles sans frissons ni vertiges, moi transi de petitesse, chétif dans ce coin de nuit, — oublieux du présent, — tout le passé qui recommence, dans un rêve enfin venu…