réseaux compliqués des vieux plombs, les mêmes topazes de boutons d’or, les rouges des pivoines ardentes, les émeraudes des myrtes et les turquoises et les saphirs d’un azur miprobable, assemblés en d’hiératiques figures de saints, de guerriers, de vierges et de fleurs, qui jettent les lueurs pâles et vaporeuses de toutes ces nuances, les bleus et les rouges surtout, contre les pierres grises des fumées de l’encens et des cierges. Or San Michele aussi retient dans la vétusté vermeille des fresques éparses le long des pilastres, comme dans les vieilles boiseries d’or vermillonné et poussiéreux de Saint-Germain, le même mysticisme dangereusement sensuel contre lequel, décidément, je ne puis me défendre et qui m’étreint là, atténuant de son charme singulier la tristesse mortelle et pourtant si douce qui fait, jusqu’à mes yeux, monter la faiblesse honteuse des pleurs…
Dans l’encoignure où je me suis retiré, caché entre les murailles des hauts portiques, autrefois grands ouverts sur la rue, quand Or San Michele était une halle aux grains, je vois les mosaïques ténues et tourmentées du Tabernacle, élevées en frêles colonnettes qui s’enfuient vers l’ombre d’en haut en spirales d’or, de porphyres et de lapis-lazuli. On distingue mal le Tabernacle d’Orcagna, mais justement ce clair-obscur enveloppant ajoute aux mièvreries charmantes de ce temple minuscule et très grand à la fois, digne des splendeurs de Byzance, perdu ici dans une lumière vague qui en estompe les contours et donne des allures d’imprécision infinie au dais resplendissant