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PARTENZA…



Sous le brocard rigide et lourd de pierreries,
Vos bras pour la prière entr’ouverts lentement,
Dans le cadre léger des ogives fleuries,
Se tendent en un geste indécis et charmant.

Et, calme, en attendant le Dieu promis, sans trêve,
Morte pour le désir avant d’avoir aimé,
Sur les vitraux dorés vous lisez votre rêve
Et votre cœur s’endort comme un jardin fermé.

Oh ! ces minutes, ces secondes de rêveries délicieuses et inexplicables où viennent, en soi, se caresser — car tout cela est très doux et très paisible — tant de pensées et de sentiments opposés, tant de sensualisme aigu uni à tant de foi ; et cette douleur, cette tranquillité sereine, ce désespoir mal défini, et par contre cette joie de vivre si nette et si intense !… Mais tout cela ne dure pas ; c’est un spasme moral tôt rentré, étouffé par le fonctionnement normal du corps, de la peau, de la guenille, intolérante pour ces fantaisies qui l’usent comme les autres, quoique moins directement faites de sa vie purement animale. Aussi voilà le prosaïsme de la rue, et je me livre à lui.

Or San Michele m’a retardé ; il faut courir maintenant pour ne pas manquer l’heure du départ. Et déjà sont loin de moi les fresques et les grisailles et les demi-lumières et les folies de marbres de l’antique église et, sur les façades, dehors, le Saint Jean de Ghiberti, le Saint Georges de Donatello, son Saint Marc et les œuvres de Michelozzo Michelozzi, de Jean de