une fleur rouge comme sa bouche, cueillie dans la verdure d’un arbuste inconnu penché sur sa jolie tête. Ses épaules s’enveloppaient d’une sorte d’aube très blanche passée sur une élégante veste de drap bleu d’acier, brodée et garnie de passementeries faites d’une multitude de petites boules de soie noire ; une très belle écharpe de soie multicolore retenait une large culotte bouffante à la mode orientale, d’un vieux rose mordoré, qui, sous les genoux, laissait ses jambes nues… Était-ce un reproche ? Ne pensais-je pas à lui, dans cette minute, en prenant de ses mains la fleur rouge qu’il me donnait si gentiment ? Non. J’errais très loin, au delà des champs d’asphodèles, vers Mekinez et Fez, où règne, sur des plaines infiniment mélancoliques, le fils de Moulaï-el-Hassan et de la Circassienne Laëla Rekia, le petit sultan Abdul-Aziz, enfoui en d’hiératiques voiles de mousselines de laine blanche. Adolescent très beau, très saint et très impénétrable, du même âge que Mohammed, pareil à lui, car Mohammed me paraissait assez joli pour avoir aussi, peut-être, une mère Circassienne ?… Et je remarquai davantage l’éclat des deux grands yeux noirs qui sollicitaient je ne sais quoi, et la superbe régularité des lignes brunes de ses sourcils tendus sur l’ombre fauve de ces yeux, par elle démesurément agrandis, et les pâleurs mates et duvetées de la peau ambrée, à travers la fumée continuelle d’une cigarrette pressée entre ses lèvres…
Je conserve toujours sa petite fleur desséchée ; elle sent encore les jasmins et les géraniums de la Villa