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PARTENZA…

fraîcheur, bientôt seront perles écrasées dans le noir du néant, chansons ensevelies dans le silence irrémédiable…

En face la cathédrale San Lorenzo des gamins font des misères aux bouquinistes dont l’éventaire de livres anciens fait craquer les minces planches des baraques ; et rien n’égale la drôlerie des petits effrontés, mauvais chalands aujourd’hui lâchés par la ville, occupés à feuilleter gravement les énormes in-folio aux textes indéchiffrables pour eux, aux tranches rouges et jaunes, aux plats caparaçonnés de cuirs épais. D’une profusion de marbre, le Campanile s’élance en un jet formidable vers le ciel, tout de marbre blanc et noir, comme la cathédrale elle-même élevée sur des marches également faites de degrés superposés de marbre blanc et de marbre noir. J’ai peur d’avouer que je ne ressens aucune admiration pour ces alternances de deux couleurs sans éclat ; il me semble que l’architecture de cette cathédrale aurait gagné en puissance l’effet dispersé dans le demi-deuil de ces murs très somptueux et très uniformes, si, par exemple, ce campanile et cette cathédrale eussent été tout de marbre blanc.

La nef, quoique encombrée d’échafaudages comme une partie du dehors, émeut par l’austérité de ses lignes, la décoration étant reléguée dans les chapelles latérales ; par endroits, malheureusement, apparaît encore cette double teinte blanche et noire, plus funérairement théâtrale encore, si j’ose ainsi dire, qu’à l’extérieur.