Page:Achim von Arnim - Contes bizarres, Lévy frères, 1856.djvu/133

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par le prince, ou plutôt par Adrien qui tenait la caisse, elle résolut de profiter de cette découverte pour s’en venger.

— Eh ! dit-elle en regardant Bella avec un visage étrange et sévère, sur mon âme, je n’aurais pas cru qu’une noble jeune fille pût se conduire si mal. Ma bonne réputation ne permet pas que cela se passe chez moi ; pour une telle conduite, on devrait fouetter la fille sur la place publique pour faire un exemple.

Bella tremblait de honte et de peur. Elle ne voyait et n’entendait plus rien, car son bonheur venait de se changer en un délaissement et un mépris affreux ; n’ayant pas l’expérience du monde, elle pouvait à peine croire qu’elle fût la même personne ; sa position lui faisait horreur ; le déshonneur qu’elle croyait voir si près d’elle faisait un effet effrayant sur sa noble âme, que rien, pas même le malheur, n’aurait pu atteindre. Elle pleura et se laissa tomber sur une chaise.

La mère Nietken laissa cette idée de déshonneur s’enraciner plus profondément dans son esprit, et lui proposa de rester pour faire passer le temps aux vieux seigneurs ; Bella ne soupçonnant rien de mal, et pensant qu’il n’y avait rien d’autre à faire que de servir