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Page:Achim von Arnim - Contes bizarres, Lévy frères, 1856.djvu/138

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Ce buisson formait la limite de deux communes, et les ossements qui l’entouraient marquaient assez la destination du lieu ; aussi resta-t-elle longtemps sans que personne fît attention à elle. Personne n’était passé de ce côté. Elle tomba bientôt dans un sommeil profond qui dura jusqu’au lendemain soir. Lorsqu’elle se réveilla, elle ne pouvait plus remuer aucun membre, ni ouvrir les yeux ; elle n’avait conservé qu’une perception vague des bruits et des sons ; elle entendit d’abord l’aboiement d’un chien, puis deux voix, qu’à leur conversation elle reconnut être celle des gardes-champêtres des deux villages contigus.

— Écoute, Pierre, disait l’un, cette femme morte est sur ton territoire.

— Je parie le contraire, répondit l’autre ; on devrait bien mettre une pierre pour mieux marquer la limite, et je suis sûr que ce corps serait de ton côté.

— Non, par le diable, tu m’as l’air de ne pas savoir ce que tu dis : les deux communes paieront l’enterrement, et cela va leur coûter beaucoup de peines et de frais, sans compter les querelles et les procès qui en résulteront.

— Écoute, mon vieux, reprit l’autre, je me souviens d’un moyen inventé par mon prédécesseur Benoît le Roux. Lorsque je trouve un cadavre, disait-