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Page:Achim von Arnim - Contes bizarres, Lévy frères, 1856.djvu/141

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Braka, Cornélius et sa compagne Bella Golem, sortirent de leur chambre pour voir la nouvelle arrivée. Comment peindre leur étonnement réciproque ? Braka ne savait quelle contenance faire ; Bella Golem ne paraissait nullement émue, comme si elle était trop sûre de son affaire pour concevoir des doutes sur sa propre personne. Bella pleurait ; abattue par la fatigue et la faim, elle avait à peine la force de les regarder. Cornélius, qui se voyait tout d’un coup en possession de deux femmes, et qui ne pouvait savoir comment cela se faisait, n’en ayant réellement pris qu’une, sautait comme un pétard (terme d’artificier), courait, leur disait des injures, sans savoir au juste ce qu’il faisait. La servante et Braka, les premières, hasardèrent que la dernière arrivée pouvait bien être la vraie ; mais Cornélius leur soutint le contraire, parce que Golem, bien habillée, lui plaisait plus que Bella vêtue des haillons d’une chanteuse ambulante.

La pauvre Bella demanda quelques aliments et l’abri pour la nuit, car elle tombait de fatigue, promettant de s’en aller le lendemain matin si on ne pouvait la souffrir dans cette maison ; mais Golem s’y opposa. On sait en effet qu’elle n’avait pris dans le miroir que quelques-unes des pensées de Bella, et c’était ce qui lui donnait une apparence d’éducation ;