Page:Achim von Arnim - Contes bizarres, Lévy frères, 1856.djvu/148

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fiance dans la pénétration de son regard, pour deviner les faussetés de l’âme. Elle lui dit que Cornélius soupçonnant quelque liaison entre elle et l’archiduc, s’était d’abord montré très-méchant, et ensuite l’avait obligée à l’épouser au premier village qu’ils avaient rencontré ; il espérait par là la dédommager de la perte du prince.

L’archiduc ne lui demanda pas d’autre explication. Le malheureux avait joué avec les enchantements pour arriver à son but, et maintenant il en était la victime. Dans l’amour tout est si noble, qu’une fourberie est comme une perle fausse enchâssée dans une riche monture, et qui éveille la défiance ; le prince n’avait-il pas trompé Bella en cherchant à la mettre en son pouvoir par des moyens surnaturels ?

Lorsque le lendemain matin au lever du soleil, et à l’heure où les corneilles, le seul oiseau des grandes villes, commençaient à crier, Cenrio vint le réveiller. Le prince sentit qu’il y avait eu quelque chose d’incomplet dans son bonheur : son cœur était triste et serré, il n’était pas heureux comme lorsqu’à Buick il prenait congé de Bella ; il lui semblait que ce n’était plus le même être qui avait dormi à côté de lui ; s’il n’était pas parti si tôt il aurait peut-être découvert sur son front le mot qui la faisait vivre. En retournant