Page:Achim von Arnim - Contes bizarres, Lévy frères, 1856.djvu/17

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Regarde là-bas, murmura la vieille ; sur cette montagne, il y a une potence ; Dieu n’y vient jamais voir, et cela s’appelle le tribunal de Dieu ; celui qu’on amène devant ce tribunal n’a pas longtemps à vivre ; la viande que le soleil y fait cuire, on ne la sert sur aucun plat ; elle reste là jusqu’à ce que nous venions la chercher. Ne crie pas, pauvre enfant, c’est ton père qui est pendu là-bas. Mais, calme-toi, reste tranquille : nous allons le chercher cette nuit, et nous le jetterons dans la rivière avec tous les honneurs dus à son rang, pour qu’il aille rejoindre ses frères en Égypte, car il est mort en pieux pèlerinage. Prends ce vin et ce plat de viande, et va, pauvre orpheline, célébrer en son honneur le repas funèbre.

Bella était si effrayée qu’elle pouvait à peine tenir ce que lui donnait la vieille.

— Tiens donc, continua la vieille, cela va tomber, et ne pleure pas ; ainsi pense que maintenant tu es notre seul espoir, que c’est toi qui dois nous reconduire, lorsque notre vœu sera accompli ; pense aussi que tu es maintenant maîtresse de tout ce que possédait ton père ; va voir dans sa chambre, dont voici la clé, tu y trouveras bien des choses. Ah ! j’oubliais : lorsqu’il m’a donné la clé, il m’a chargé de te dire de ne plus avoir peur de son chien noir Simson,