Page:Achim von Arnim - Contes bizarres, Lévy frères, 1856.djvu/253

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d’eux. Mathilde arriva en ce moment ; elle l’entendit avec inquiétude parler de son départ ; elle lui rappela qu’il avait au moins sauvé ses enfants ; que par sa présence il l’avait consolée, qu’elle était inquiète de le voir s’éloigner ; mais tout cela ne put le retenir.

Le lendemain, on recueillit le cadavre de Frenel à une lieue de la maison. Il s’était jeté sur son épée.

On trouva à côté de lui un billet. Il disait qu’il s’était fait justice de sa propre main sur une route publique, où passe la joie aussi bien que le malheur, et pour que le souvenir de son sang répandu ne troublât aucun des paisibles habitants de cet heureux pays en coulant sur sa terre.

Comment décrire la douleur de la comtesse lorsqu’elle reçut ce dernier coup, qui lui rappelait si douloureusement ceux qui l’avaient déjà frappée dans ses plus tendres affections.


La tranquillité était rétablie ; Mathilde était rentrée en possession de ses biens avec ses beaux enfants ; mais tout cela n’était rien pour elle. Celui qui croit posséder l’univers, et celui qui se considère comme n’y possédant rien sont deux grands caractères. Mais ce que je puis appeler un admirable sentiment, c’est le sentiment complet du néant à l’égard du monde,