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L’île Ste. Hélène

sons mats, secs et sourds ; chaque coup de baguette ressemble à un sanglot ; cela frappe l’oreille mais tombe sur le cœur.

Le dernier peloton vient de se former à la gauche de l’armée. Les troupes sont rangées en ordre de bataille. En avant de leur front, un vaste brasier où flambent des troncs d’arbres, éclaire les mâles figures d’un groupe d’officiers, au milieu desquelles se détache pâle et crispé le visage du chevalier de Lévis.

Au mouvement décrit par l’épée du commandant en chef, les tambours de toutes les compagnies éclatent à la fois, comme un coup de tonnerre ; puis les roulements diminuent, s’affaiblissent, pour moduler ces gémissements lugubres et sourds au milieu desquels les fifres jettent, semblables à des cris plaintifs, des notes entrecoupées et stridentes.

À ce moment, trois hommes sortent des profondeurs des rangs et se dirigent vers le brasier ; ce sont les porte-étendards de chacun des régiments. Tous trois tiennent d’une main ferme, mais le front incliné, la hampe du drapeau dont les plis, déchiquetés par la mitraille, retombent en lambeaux.