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Page:Adam - Irène et les eunuques, 1907.djvu/67

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IRÈNE ET LES EUNUQUES

Il en arriva par les routes de Bithynie, en processions, avec les flammes innombrables des cierges. Quand ils apercevaient les murs illustres de la ville, ils s’arrêtaient. En quelques jours, les collines se trouvèrent peuplées de moines. Ils s’installaient sur les cimes, laissant les creux du terrain aux religieuses, par décence.

Les bourgeois d’Éphèse qui vinrent les visiter leur apprirent qu’on préparait la ville pour l’entrée des dignitaires. Constantin V avait envoyé déjà les hérauts et les scholaires de sa garde. Ces prétoriens détruisaient à coups de hache les dernières images incrustées dans les murailles, ou brûlaient celles faites de bois.

Bientôt, les légions parurent derrière les moines ; et l’on reconnut, évoluant à la lumière, les cuirasses d’or des stratèges, leurs casques à chenilles de pourpre. Michel Lachanodracon les commandait. Envoyé de Constantin, l’eunuque Eutychès surveilla. Il ne portait qu’une robe noire à larges bandes bleues. Son cheval était couvert d’une housse pareille, fendue seulement à la place des yeux et des naseaux. En sorte qu’ils semblaient un même être, centaure à tête de vieille femme, traînant dans les herbes, dans la poussière, des pans d’étoffe sombre.

Les paysans se défiaient des soldats. Cet homme triste inspira de la sympathie. Comme il passait par le hameau le plus proche de la mer, un s’enhardit jusqu’à lui demander quand allait naître le Sauveur…

— Tu attends avec raison le Sauveur…, répondit