Page:Adam - L’Enfant d’Austerlitz (1901).djvu/130

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les bois, dès la vue du gui, l’enfant se plaisait au rôle du druide. Couronné de feuilles, il était habile à manier la faucille d’or plus puissante qu’un sceptre ou qu’un glaive pour courber en adoration les têtes d’un peuple. Caroline riait, l’embrassait, disant : ― alors, tu es un druide… tu n’es donc plus Moïse, à présent ? ― c’est la même chose. ― bah ! ― ils commandaient les nations, tous, Moïse et les druides, avec les lois d’égypte… ― ma chère belle, ton grand-père le rendra sot, ce petit !… ― ah ! Ma bonne, ― répondait Mme Héricourt, ― Dieu le sait : ce vieux jacobin empeste l’âme de mon enfant… patience, j’y porterai remède, quelque jour. Le pouvait-elle, puisqu’elle demeura couchée de longs mois dans la chambre ducale ? Le médecin montait souvent l’escalier, et, après sa visite, Céline emportait un bassin rempli de sang. Maman Virginie ne semblait pas chagrine au milieu du grand lit blanc magnifique, qu’entouraient des rideaux en damas cramoisi. Ses beaux cheveux argentés, ses longues mains brunies, la douceur riante de son visage, enfoui dans les dentelles des oreillers et des draps, ne conseillaient pas aux visiteurs de s’apitoyer trop. Omer apprit que le mal siégeait au ventre. Lui-même souffrait parfois d’indigestions : c’était pareille misère, sans doute. Il priait Jésus de guérir sa mère, chaque soir et chaque matin. Bien des dimanches se succédèrent avant qu’elle l’emmenât au village, pour assister à la grand’messe. La mère s’occupait de Dieu, de ses maux et d’économies ; Caroline, de ses commerces, de ses voyages entre l’Artois et la Lorraine. On la voyait revenir souvent, grognante, active. Alors, elle s’installait au salon