Page:Adam - L’Enfant d’Austerlitz (1901).djvu/258

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le commerce ? ― ça va. Je mène du savon, de la chandelle, des épices, des pièces de tulle, de la chaudronnerie, depuis Lille jusqu’à Arras. Je rapporte de la farine et des cuirs… bah ! On marche comme au bon temps. J’ai toujours huit chevaux, comme dans mon peloton (il montrait l’attelage). Sur la route, je connais des frères, des anciens, ceux de la loge gloire militaire et ceux de la loge saint-Napoléon. on boit ensemble à la santé de l’autre ! On se rappelle les coups de chien… à Rœux, ma femme tient une bonne petite épicerie. ― des enfants ? ― pas cette pimpèche qui se frotte aux curés !… je venais la voir en passant… comme tuteur, quoi ? C’est ma nièce. Mais j’ai deux garçons à moi… hé ! Les voilà sur onze et douze ans… c’est déjà des ratapoils qui vous crient : " vive l’empereur ! " au dos du sacristain. ― bravo, mon vieux !… alors, tu te rappelleras : le capitaine Lyrisse… ― sûr !… à l’orient d’Arras, demain… mon capitaine ! Par jeu, il prolongea le signe maçonnique de la batterie d’allégresse, vraiment heureux de la rencontre. L’oncle Edme répéta le signe ; et l’on prit congé du vétéran, qui s’en fut dételer ses bêtes. Les cavaliers sortirent du bourg. Omer admira le major enchanté de son apostolat sur la route, et très droit dans l’habit feuille morte à boutons d’acier : les muscles de ses cuisses bosselaient la culotte de daim gris jusqu’aux bottes à l’écuyère. ― qu’en penses-tu, mon petit ?… on les rencontre sur tous les chemins. Ils n’oublient pas… et au nez de la congrégation, parbleu !… c’est admirable, hein ? Malin, il releva sa forte tête vivante à l’ombre du haut chapeau de castor ébouriffé. Ses yeux escrimeurs