des poutres en feu… et les balles qui crevaient les chevaux !… devisant avec animation, ils pressaient la vitesse de leurs montures. Omer Héricourt tremblait tour à tour d’orgueil et de peur. " demain, demain, pensait-il je serai parmi ceux qui sauveront la France, la fraternité, l’empereur ! Mais peut-être aussi les gendarmes me tueront-ils ?… non. Personne ne résistera. Qui résisterait à de tels héros ?… si le bisaïeul me savait avec eux, comme il me féliciterait ! Je saurai lui écrire tout… mon père serait content… sans doute me regarde-t-il du fond du tombeau… et son caractère revit en moi. Oh ! Je promulguerai la loi, plus tard, à tout un peuple avide de justice ! Quand j’entrerai dans Arras, demain, je crierai : " vive la charte !… vive la loi !… vive l’égalité !… " les censitaires me nommeront député. Je ferai la révolution, comme Mirabeau. Ensuite on m’offrira peut-être l’empire, si je restitue aux hommes la fraternité de Babel… cela vaudra bien la mitre et la tiare ! " et il transposa dans la politique ses rêves de papauté, non moins ivre de triomphes futurs et d’acclamations prévues. Pesant sur les étriers, il sautait en cadence avec le trot de sa bête dont le poil exhala une odeur plus forte, car un orage allait poindre. Le ciel fut envahi de nuages violâtres, ourlés de soufre et d’or. Des ombres s’abaissèrent. Le pays devint brusquement pareil à ces gravures où l’on voit un pauvre moissonneur que ruinera la grêle destructrice des récoltes. Il met la main à ses yeux pour apercevoir jusqu’à l’horizon l’envergure du fléau ; il ne se peut soutenir ; ses genoux fléchissent ; sa main oublie la faucille qui tout à l’heure abattait le froment, au son d’un couplet joyeux ; ses nobles traits s’altèrent ; il s’est déjà laissé choir à demi contre la gerbe coupée, et le plus atroce désespoir se peint sur
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Apparence