Page:Adam - L’Enfant d’Austerlitz (1901).djvu/359

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gories… ou de croire aux apparitions de la lanterne magique !

― Tu as tort de douter, petit. Cela n’était que la parade, mais derrière la toile on a fait de grandes choses… ainsi, dans une des loges de Cagliostro, la sagesse triomphante, à Lyon, vers mil sept cent quatre-vingt-huit… je rencontrai M. Mirabeau entre les cierges. Il rentrait de la mission que M. De Calonne lui avait confiée pour Berlin, signe du pardon royal après tant de disgrâces. Il était alors complètement engoué de l’illuminisme, à quoi les prussiens l’avaient récemment initié. Je lui rappelai que notre atelier saint-Jean-d’écosse de Marseille avait, vingt ans plus tôt, envoyé une troupe d’acteurs jusqu’en Brandebourg pour dresser l’autel où il avait prêté le serment. Il goûta mes souvenirs là-dessus ; et nous fîmes route ensemble jusqu’à Paris dans ma chaise. Nous convînmes de répandre l’opinion qu’une assemblée des états généraux était nécessaire. " M. De Mirabeau estimait, aussi bien que moi, que les députés du tiers et du clergé seraient presque tous imposés par nos loges de province. De fait, il n’en fut guère autrement… les sept ateliers de Bordeaux désignèrent aux électeurs les premiers girondins, Vergniaud et Gensonné, lesquels nous reçûmes à Paris en grande pompe dans notre loge des neuf-sœurs. Le duc de La Rochefoucauld présidait. Aux côtés de Pastorel, vénérable, siégeaient Brissot et Lacépède. Sur les colonnes étaient assis : Dolomieu, dont les libraires vendaient alors le traité concernant les îles Ponces et les pierres volcaniques de l’Etna ; Bailly, l’auteur des astronomies, qui, tout de noir vêtu, chargé d’une perruque à rouleaux, attentif et immobile, dévisageait les orateurs de son œil grave ; Bailly qui se moquait, en crispant les deux rides de sa joue maigre, Bailly qui devait présider l’assemblée nationale au jeu de paume, avant que de